Pour que l’amour et l’argent fassent bon ménage
Des conseils pour une relation basée sur du solide.
Nathalie Savaria | paru le 14 février 2024 sur Conseiller.ca
Pour que l’amour et l’argent fassent bon ménage | Conseiller
On gagne toujours à discuter ouvertement de ses finances dans un couple, notamment si l’un des membres est employé, et l’autre, à son compte.
C’est ce scénario particulier que nous avons soumis à Jean-Philippe Vézina, Pl. Fin., M. Fisc., planificateur financier chez Jean-Maurice Vézina – Équipe conseil en planification financière – IG Gestion privée de patrimoine.
S’INFORMER SUR LES DIFFÉRENTS TYPES D’UNION
Le planificateur financier souligne d’abord qu’au Québec, près de 43 % des couples vivent en union de fait, comparativement à 22 % au Canada. Ainsi, après au moins 12 mois consécutifs de vie commune, les deux membres du couple ont l’obligation légale de se déclarer conjoints de fait dans leur déclaration d’impôt respective.
« Malheureusement, les gens sont mal informés parce qu’ils pensent que, [pour cette raison], ils sont autant protégés que les gens mariés. En réalité, il n’y a aucune protection pour les conjoints de fait », prévient-il.
Il cite en exemple le cas fictif d’une conjointe qui s’implique sans être rémunérée dans l’entreprise de son conjoint. S’il y a séparation, comme le couple vivait en union de fait, elle n’aura pas droit à une partie de la valeur de l’entreprise.
« Par contre, devant les tribunaux, si on arrive à prouver qu’il y a eu enrichissement injustifié du conjoint alors qu’elle s’est appauvrie, elle pourra recevoir une compensation », explique M. Vézina, qui mentionne l’existence de cas jurisprudentiels au Québec.
En attendant un changement dans la loi qui viendra davantage protéger les conjoints de fait, il est impératif – qu’on soit employé ou entrepreneur – de conclure un contrat de vie commune afin de s’entendre sur les biens et les dettes que chacun possède, sur la gestion des dépenses et les contributions de chacun, ainsi que sur les modalités en cas de rupture, recommande-t-il.
Pour un couple qui se marie, il faut savoir que le régime matrimonial aura une incidence sur le patrimoine professionnel du conjoint entrepreneur. D’où la nécessité de consulter un professionnel à ce sujet.
« Dans le régime de la séparation des biens, par exemple, l’entreprise de madame reste à madame. Dans le régime de la société d’acquêts, si l’entreprise de madame a été acquise pendant le mariage, cela tombe dans les acquêts. Sinon, si c’est avant le mariage, l’entreprise demeure un bien propre de madame. Par contre, toutes formes de rémunération (salaires, dividendes) provenant des bénéfices seront considérées comme des acquêts. »
ÉTABLIR UN BUDGET
Pour se protéger financièrement, le couple doit prioritairement faire un bilan financier pour connaître l’état de ses comptes, puis se fixer un budget.
Techniquement, la chose est aisément réalisable.
« Aujourd’hui, avec toutes les applications mobiles disponibles, on est capable d’avoir en temps réel un budget, puis un plan financier », fait valoir le planificateur financier.
D’après lui, une façon intéressante de procéder est d’établir un budget à partir de la dernière déclaration de revenus de chacun pour bien répartir les dépenses dans le couple.
SOUSCRIRE DES ASSURANCES
Au-delà du budget, il faut aussi se projeter dans l’avenir et songer aux situations qui pourraient ébranler les finances du couple, comme un accident, une maladie, un décès ou une faillite.
Généralement, un employé bénéficie d’un régime d’assurance collective de son employeur, ce qui n’est pas le cas pour une personne en affaires. Celle-ci doit donc prévoir des assurances.
Outre une assurance invalidité, « la plus importante pour une personne en affaires », M. Vézina suggère notamment de souscrire une assurance maladies graves ainsi qu’une assurance vie afin que le couple ou l’entreprise ne se retrouve pas en difficulté financière, faute de revenus.
RÉDIGER UN TESTAMENT
Il recommande également de rédiger un testament si on veut léguer ses biens au conjoint survivant, spécialement s’il s’agit d’un conjoint de fait, qui n’est pas l’héritier légal selon la loi.
Dans ce dernier cas, sans testament ou s’il n’est pas désigné comme tel dans un testament, celui-ci n’obtiendra rien.
SIGNER UNE CONVENTION ENTRE ACTIONNAIRES
Le planificateur financier recommande aussi fortement à tout propriétaire d’une société avec d’autres partenaires d’affaires de signer une convention entre actionnaires.
Cette entente contractuelle permet de prévoir certains risques et événements qui pourraient survenir dans la relation d’affaires, comme le décès, l’invalidité ou l’inaptitude d’un partenaire.
« L’importance d’avoir une convention entre actionnaires, c’est majeur. Si je suis en affaires avec deux autres personnes, elles ne voudront peut-être pas que ma conjointe soit impliquée dans l’entreprise. Et à mon décès, elles voudront que ma succession leur vende mes actions. »
« Malheureusement, constate-t-il, c’est rarement fait. Et si c’est fait, ce n’est pas toujours signé. Et si c’est signé, c’est souvent un modèle que les actionnaires ont trouvé sur le Web et qui ne représente pas bien l’entreprise. »
S’INCORPORER OU PAS ?
Enfin, il faut prendre en considération d’autres variables, signale le planificateur financier, à savoir si la personne en affaires dans le couple est un travailleur autonome qui gère une entreprise individuelle ou une société incorporée ou par actions.
Entre autres avantages, une société incorporée est une entité distincte, ce qui signifie qu’en cas de faillite, le propriétaire n’est pas personnellement responsable des dettes ni des obligations de l’entreprise.
MISER SUR LA PLANIFICATION
Pour Jean-Philippe Vézina, un couple a donc tout intérêt à aborder ouvertement les questions d’argent dès le départ. Il peut aussi consulter un planificateur financier pour s’assurer d’une bonne planification financière.
« Si des gens me demandent des rencontres individuelles, je n’ai rien contre, mais je leur dis que ça serait bien d’avoir au moins une rencontre par année en couple, pour la famille. On n’est pas obligé de parler de leurs placements s’ils ne sont pas à l’aise, mais pour la retraite par exemple, si on est deux, un plan de retraite individuel, ce n’est pas réaliste. »
Le planificateur financier peut également aider le couple à planifier le transfert d’entreprise qui peut parfois survenir de manière impromptue, notamment si le propriétaire tombe malade ou décède.
« La personne en affaires est impliquée à 110 % dans son entreprise. Les choses vont vite. Elle ne songe même pas à la relève de l’entreprise. Pourtant, c’est vraiment important d’y penser », souligne-t-il.
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